mardi 28 juin 2016

Ludovico Einaudi : le « chant de mort » qui illumine la vie




 
Les genres musicaux les plus classiques ouvrent parfois des possibilités insoupçonnées. C’est le cas de l’élégie (chant de mort en grec), appréciée notamment par Fauré, Poulenc, Saint-Saëns et Wagner. Désormais, l’élégie rime aussi avec l’engagement porté par une performance. On le découvre grâce à la vidéo tournée dans l’archipel de Svalbard (Norvège) et mettant en scène le compositeur et musicien italien Ludovico Einaudi. Seul sur une structure flottante au milieu de la banquise, il interprète au piano à queue Elegy for the Arctic, une œuvre composée spécialement pour l’occasion. Créée en partenariat avec Greenpeace, la vidéo qui a été visionnée plus de trois millions de fois en 48 heures a pour ambition de sensibiliser le monde aux conséquences du réchauffement climatique pour l'Arctique et son écosystème. Baptisée "Sauvez l'Arctique", la campagne renvoie à une pétition que le compositeur invite à signer sur sa page Facebook.
 
"Être là fut une expérience extraordinaire, déclare Ludovico Einaudi. J'ai pu constater la pureté et la fragilité de cette région de mes propres yeux et interpréter une musique que j'ai composée pour être jouée sur la plus belle scène du monde. Il est important que nous comprenions l'importance de l'Arctique, que nous stoppions sa destruction et que nous le protégions".
 
Défenseur convaincu de l’environnement, Ludovico Einaudi habite dans un domaine viticole dans la région du Piémont. Après avoir débuté sa carrière musicale à la fin des années 1980, il a réussi à trouver  un style personnel à travers une musique ambiante, méditative, souvent introspective et inspirée du minimalisme. Plusieurs de ses compositions ont servi pour la bande sonore de différents films ou séries, dont This is England (2006), Intouchables (2011) ou encore Mommy (2014). Ludovico Einaudi se produira en France le 19 juillet au théâtre antique d’Arles, dans le cadre du festival Les Escales du Cargo.
 
 

lundi 20 juin 2016

La Nuit des Arts et des Mondes à Pantin


 
Grâce à « Séances sur Seine » et à sa fondatrice Mariam Yazigi, nous avons pu assister à un événement exceptionnel : La Nuit des Arts et des Mondes, festival des Arts, de la Culture et de l’Interculturalité.  Créé en 2007 et porté par l’Association Arts-Mondes-Cultures, il a présenté cette année sa troisième édition qui s’est déroulée dans les Sheds de Pantin et avait pour thème l’ART DU RENOUVEAU.
 
 
 
 
Son programme était extrêmement riche et varié, avec une exposition d’Art contemporain, la construction de MURS du Renouveau, des scènes impromptues théâtrales ou d’improvisation, des concerts, des performances, des films, des débats, des rencontres et des animations organisées par les associations locales. L’événement était placé sous le patronage de la Commission Nationale Française pour l’UNESCO, de la Commission Nationale Roumaine pour l’UNESCO, du Mona Bismarck American Center et bénéficiait du soutien de la Ville de Pantin.
 
 
 
 
Pendant ce festival gratuit et ouvert à tout le monde, le public devient spect-acteur et contribue aux univers artistiques, aux performances, aux œuvres, en les faisant évoluer. Comme les années précédentes, cette troisième édition avait pour objectif de promouvoir les valeurs de citoyenneté, solidarité, transmission, le vivre et surtout le construire ensemble dans un cadre commun, mais aussi de rassembler et de créer des liens entre les populations de tous les quartiers.
 
 
 
 
De nombreux continents et pays sont représentés lors de cet événement. L’édition 2016 a mis à l’honneur trois pays : la France, les Etats-Unis et la Roumanie, unis dans leurs fondements par l’Esprit des Lumières, l’expression de la liberté et les découvertes interculturelles.
 
 
 
 
En présence d’officiels des 3 pays et de leurs artistes contemporains, le festival a célébré  160 ans d’amitiés Franco-Roumaine,  240 ans de la déclaration d’indépendance des Etats-Unis et les 70 ans de l’UNESCO.  Des conférences-débats ont eu lieu les 9 et 11 juin avec des personnalités françaises, roumaines et américaines, portant sur l’évolution du monde et la possibilité de construire des rapports plus solidaires et plus humains.  
 
 
 
L’association Arts-Mondes-Cultures porteuse du festival a pour buts de promouvoir les arts, la diversité culturelle et les liens entre les cultures, afin d’assurer une interaction harmonieuse et un vouloir vivre ensemble de personnes et de groupes aux identités culturelles à la fois plurielles, variées et dynamiques.







samedi 18 juin 2016

Frédéric Grèze : « Plus ambigu qu’une simple farce… »


Frédéric Grèze

 

Dans cette interview exclusive, le gagnant du Concours de manifeste 2016 évoque sa démarche, ses inspirations et ses projets.


1. Pourquoi avoir participé à ce concours ?

Depuis cette année, je participe aux ateliers L'Écriture sous toutes les Coutures d'Hélène Marciano. Lorsqu'Hélène a proposé de travailler sur un manifeste, j'ai pensé à cette idée d'une plaidoirie contre les sondages. La séance s'est terminée et on est passé à autre chose. Plusieurs mois plus tard, j'ai repris mes notes, fait quelques recherches sur le web sur des sondages idiots et j'ai vu se dessiner quelque chose de plus intéressant, de plus ambigu qu'une simple farce. Alors j'ai continué avec un petit logiciel de mise en page et puis comme je suis un peu joueur, je me suis rappelé du concours...

 

2. Est-ce la première fois que vous participez à un concours littéraire ?

En tant que candidat oui, mais il y a eu une dizaine d'années, j'ai eu le grand privilège d'être sélectionné comme juré pour le prix du livre Inter. J'en garde un souvenir mélangé de plaisir et de frustration. Plaisir d'avoir longuement débattu sous la présidence d'Olivier Rollin, un romancier que j'aime énormément, et de frustration car nous n'avons pas primé le livre que je préférais (François Bon "Daewoo roman").

 
Le spectacle poétique au Château d'Asnières


3. Qu’est-ce qui vous séduit dans le genre de manifeste ?

Je ne pense pas pouvoir faire une réponse générale car ce n'est pas un genre que je connaissais particulièrement avant de m'y essayer. Il me semble que c'est un exercice qui vise à convaincre, à défendre des positions très marquées, des idées en général généreuses et basées sur des convictions très fortes.

Ce qui m'a amusé c'est de détourner un peu l'approche en essayant d'ajouter de l'ambiguïté, du malaise sur des thèmes qui me tiennent à cœur: notre part de commune médiocrité que révèlent les sondages, mais la révèlent-ils ou la créent-ils ? et quelle est notre part de responsabilité dans cette création / révélation ? qui nous oblige à répondre sur notre préférence entre Zidane et l'abbé Pierre, ou à des questions croisées sur nos pratiques sexuelles et nos opinions politiques (vous pouvez vérifier sur Google, ce sondage là existe vraiment !!) ? à acheter les journaux, écouter les émissions qui donnent les résultats de ces enquêtes débiles?


 

La question de l'opinion publique face à la peine de mort est par ailleurs certainement une de celles qui a été le plus l'objet d'enquêtes. Quand j'étais enfant c'est un sujet dont nous parlions régulièrement en famille car mes parents étaient viscéralement contre et nous aurions pu écrire avec enthousiasme un manifeste pour son abolition! Dans le camp d'en face, je me souviens qu'un des grands arguments pour continuer à couper des têtes étaient que tous les sondages montraient que les Français n'étaient pas prêts à y renoncer. C'est pour ça que j'ai trouvé amusant de retourner la violence de la foule contre les sondeurs. Quand on joue avec les mauvais instincts, le pire devient possible.


 

Le manifeste, par sa mise en page, donne aussi la possibilité d'une "mise en scène de l'écriture". Ainsi, à la fin de la première page de mon texte, on peut penser qu'on a affaire à un tract populiste pour la peine de mort et en être révolté, au début de la 2ème page on peut croire que c'est juste une farce et en rire; à la fin de la lecture, peut-être qu'on est aussi un peu mal à l'aise face à notre penchant collectif pour la médiocrité et les réactions grégaires qui peuvent facilement désigner des boucs émissaires.

Je ne sais pas si ça fonctionne aussi bien que ça mais en tout cas j'espère qu'au moins certains lecteurs ou auditeurs ont pu passer par ce large éventail de ressentis. C'est d'ailleurs pour ça que j'ai appelé ce texte "Mise en abîme".


4. Y a-t-il un auteur qui vous inspire particulièrement ?

Même si je n'y ai pas pensé en écrivant, je me suis dit a posteriori j'avais peut-être été en partie inconsciemment inspiré par le livre de Charb "Petit Traité d'intolérance" et aussi certainement par les plaidoiries inoubliables de Pierre Desproges dans une émission de radio de ma jeunesse "Le tribunal des flagrants délires". Quand je cherche une référence en matière de mélange d'humour, de profondeur derrière le rire et de qualité d'écriture, Pierre Desproges est pour moi définitivement indépassable.

 
La lecture de Mise en abîme par les participants de l'atelier d'écriture


5. Quel sera votre prochain défi créatif ?

Emporté par mon enthousiasme dans la foulée du concours de manifestes, j'avais aussi envoyé un texte au concours de poésie RATP dont les 100 finalistes viennent d'être sélectionnés. Je ne suis pas dans la liste, quel dommage ça doit vraiment être le pied de voir un texte qu'on a écrit, affiché sur les murs du métro! J'ai envoyé un 3ème texte très différent au concours d'une maison d'édition, Flammes Vives de la poésie. J'attends les résultats en juillet et je ne doute de rien ! Ce que j'ai vraiment trouvé sympa dans les ateliers de l’Ecriture sous toutes les Coutures, c'est justement de pouvoir explorer des thèmes et des contraintes d'écriture très variées. J'ai vraiment envie de continuer et d'essayer aussi de travailler sur des exercices de style jouant avec les sonorités des mots, mes collègues d'atelier sont très forts pour ça!

 

dimanche 5 juin 2016

Une récompense internationale pour Piotr Pavlenski


 
Piotr Pavlenski a reçu le prix Václav Havel pour la dissidence créative. Jugé à Moscou pour avoir mis le feu aux portes du siège historique du KGB, l’artiste de l’extrême, utilisant son corps comme matériau, s’était fait connaître pour d’autres performances spectaculaires souvent associées à l’automutilation. En 2012 avec l’action Suture, ce performer politique s’était cousu les lèvres avec du fil écarlate pour protester contre l’arrestation des Pussy Riot. En 2013, il s’enroule, nu, dans du fil barbelé, et s’allonge devant le Parlement de Saint-Pétersbourg pour dénoncer la politique répressive et homophobe du gouvernement russe. 

 

Le 23 février 2013, il met le feu à des pneus érigés en barricade sur un pont de Saint-Pétersbourg, en hommage au soulèvement de Maïdan, en Ukraine. En novembre 2013, lorsque la Russie célèbre « La journée de la police », il se déshabille encore et se cloue la peau des testicules sur les pavés de la place Rouge à Moscou pour protester contre le régime policier. En octobre 2014, il escalade, nu, un mur de l'enceinte de l’Institut psychiatrique Serbski tristement célèbre pour avoir accueilli des dissidents au régime soviétique. Il se coupe ensuite le lobe de l’oreille droite pour protester contre le recours à la psychiatrie à des fins politiques.

 

Pavlenski a été déclaré sain d’esprit par cet établissement, en janvier 2015, après y avoir été interné pendant 21 jours. Pour justifier sa méthode de travail, il évoque le souci de briser la peur et l’apathie de la société russe et le besoin d’imiter la violence du code visuel des actions du gouvernement.  Ce n’est donc pas par hasard qu’il a demandé d’être jugé pour « terrorisme », souhaitant faire de son procès une tribune. En raison de ce procès, il n’a pas pu recevoir son prix remis à son épouse le 25 mai à Oslo.

 

Le Prix Václav Havel pour la dissidence créative a été créé en 2012 par la Fondation des droits de l'homme basée à New York (HRF). Selon son président Thor Halvorssen, le prix récompense les individus « qui se livrent à la dissidence créative, en faisant preuve de courage et de créativité pour défier l'injustice et de vivre dans la vérité». Aung San Suu Kyi, Pussy Riot et la caricaturiste iranienne Atena Farghadani font partie des lauréats.